Chauffage, amuse-bouches, DJ, boisson à volonté : dans les loges du Parc des Princes, le confort règne. Le match du PSG s’observe à travers une baie vitrée, la vue est plongeante, comme un bel écran de cinéma. Les commentaires et chants de supporters arrivent étouffés. Si proches des gradins, pourtant si loin !
On est loin de la classique ambiance pinte de bière, chants et doigts glacés. Le football est pourtant considéré comme l’archétype du sport « populaire », autant dans le sens d’être apprécié d’un grand nombre de personnes que « relatif au peuple, en tant que milieu social ». De Saint-Étienne à Liverpool, le ballon rond a naturellement fait son trou dans le cœur de travailleurs souvent défavorisés. Si l’amour n’a pas décru, être supporter aujourd’hui est loin d’être donné.
C’est parti pour les chiffres : la place en gradins, en « one-shot », coûte entre 40 et 500 euros, en fonction de son emplacement et du match. La plus grande partie du stade est toutefois occupée par les abonnés. Ils grincent chaque année des dents devant les tarifs, qui augmentent régulièrement. Trois abonnements sont disponibles pour les places en gradins : 460 euros pour le virage Auteuil, 640 euros pour le reste des tribunes, et un abonnement « Club Premier » à 1320 euros. Un sacré budget.
Depuis que le Qatar a racheté le PSG, en 2011, pour la modique somme de 50 millions d’euros, le stade propose de plus en plus d’espaces privilégiés, des loges aux salons. Le quasi-inaccessible carré VIP, où le président du club a son fauteuil, peut accueillir 242 personnes – de marque. On ne peut pas acheter sa place : on est convié. Un peu plus de 4 000 chanceux peuvent profiter des espaces privés, à des tarifs corsés. Ils représentent 10 % de la capacité d’accueil du stade… et plus de 50 % des recettes.
L’économiste du sport Pierre Rondeau parlait en 2018 « d’embourgeoisement des stades », dans Le peuple des loges. Quand les classes populaires se font chasser des stades de foot.
« Les stades sont à moitié vides, l’ambiance a disparu, au profit d’un calme plat, aseptisé, dépourvu de toutes violences et de peurs (…) Les supporters sont oubliés, chassés des enceintes, remplacés par une classe aisée, qui regarde silencieusement les joutes hebdomadaires, à la recherche des bénéfices externes du football. »
C’est à ça que ressemble la stratégie du PSG, qui met de côté les supporters de la première heure au profit d’un public de richesse et d’influence.