L’ONU : comment fonctionne cette organisation au cœur des grands enjeux mondiaux ?

Organisation incontournable des relations internationales, l’ONU est au centre des efforts pour la paix, les droits humains et le développement durable. Mais concrètement, à quoi sert-elle ? Comment fonctionne-t-elle ? Et quel est son impact aujourd’hui ?

« Nations Unies : Paix, dignité et égalité sur une planète saine ». Cette devise résume l’ambition de l’Organisation des Nations unies (ONU), créée pour garantir la paix mondiale et promouvoir la coopération internationale. Avec 193 États membres et près de 37 000 employés répartis sur tous les continents, l’ONU est une organisation à vocation universelle. Cela signifie qu’elle traite de problématiques qui dépassent les frontières nationales : conflits armés, dérèglement climatique, famines, pandémies, droits humains. Mais l’ONU n’a pas toujours existé. Elle est le fruit d’un long processus de réflexion pour empêcher la répétition des horreurs de la guerre.

Avant l’ONU : l’échec de la SDN

Créée en 1919, au lendemain de la Première Guerre mondiale, la Société des Nations (SDN) avait pour ambition de préserver la paix dans le monde. Mais sans moyens concrets d’action ni participation des grandes puissances comme les États-Unis, elle s’est révélée impuissante face à la montée des fascismes et à l’agression des régimes totalitaires dans les années 1930. L’incapacité de la SDN à empêcher la Seconde Guerre mondiale a mis en lumière la nécessité d’une organisation internationale plus forte et mieux structurée : ce sera l’ONU.

Les grandes étapes de sa création

Une gouvernance internationale structurée

Les 6 organes principaux ont été tous créés dans le cadre de la Charte des Nations unies, en juin 1945 : 

  • L’Assemblée générale : c’est un forum de discussion entre tous les États membres. Cet organe assure l’égalité entre États, donne une plateforme d’expression à tous et prend des résolutions (non contraignantes, c’est-à-dire à caractère non obligatoire).
  • Le Conseil de sécurité : Il s’agit d’avoir un organe capable de prendre des décisions rapides et obligatoires en matière de conflits armés, avec un pouvoir réel (ex : sanctions, interventions militaires, envoi de casques bleus). Les membres sont au nombre de 15, dont 5 permanents avec un droit de veto : USA, Russie, Chine, France, Royaume-Uni. Ces puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale ont été dotées d’un statut spécial, reflet du rapport de force de l’époque.
  • Le Secrétariat : C’est l’organe administratif de l’ONU. Il est chargé de mettre en œuvre les décisions prises par les autres organes de l’ONU (comme l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité) et de gérer le fonctionnement quotidien de l’organisation. Le secrétariat est représenté par le secrétaire général. 
  • Le Conseil économique et social (ECOSOC) : il coordonne les actions de l’ONU dans les domaines économique, social, humanitaire et du développement durable, en collaboration avec les agences spécialisées et la société civile.
  • Cour internationale de justice (CIJ) : c’est organe judiciaire principal de l’ONU, basé à La Haye. Elle règle les différends juridiques entre États et donne des avis consultatifs sur des questions de droit international.
  • Cas particulier – La Cour pénale internationale (CPI) : Elle agit indépendamment de l’ONU, mais peut être saisie par le Conseil de sécurité. Elle est chargée de juger les personnes (et non les états) accusées des crimes les plus graves (génocides, crimes contre l’humanité, crimes de guerre …). Mais son action est limitée car certains pays ne reconnaissent pas cette cour, comme les Etats-Unis, la Chine ou la Russie.
Assemblee generale

Le Secrétaire général

Actuellement occupé par António Guterres (9e à ce poste), le poste de Secrétaire général est à la fois diplomatique et administratif. Il représente l’ONU sur la scène internationale et joue un rôle clé dans la prévention des conflits. Il ne possède pas de pouvoir militaire, ni de force exécutoire, mais il agit par : la diplomatie, le plaidoyer moral et politique, la coordination humanitaire, et il représente une présence symbolique forte. 

Exemple d’une mission au Myanmar réalisée par le secrétaire général actuel, Antonio Guterres

Depuis le coup d’État militaire de février 2021 au Myanmar, la situation politique et humanitaire s’est fortement dégradée, avec de nombreuses violations des droits humains. 

  • António Guterres a appelé à la fin de la répression, à la libération des prisonniers politiques, et au retour à la démocratie. 
  • Il a mandaté une envoyée spéciale de l’ONU pour le Myanmar (Noeleen Heyzer) pour dialoguer avec les différentes parties, y compris la junte militaire, les groupes ethniques armés et la société civile. 
  • Il a saisi les grandes puissances (notamment les membres permanents du Conseil de sécurité) pour qu’elles prennent des mesures concertées.

Son objectif était de trouver une solution pacifique à la crise, éviter une guerre civile et protéger les droits de la population.

Les États membres : 193 voix, une organisation

De l’Afghanistan au Zimbabwe, 193 pays sont membres de l’ONU. Chaque État dispose d’une voix à l’Assemblée générale, quel que soit son poids économique ou sa taille. Cette égalité formelle est l’un des fondements du multilatéralisme.

Pour devenir membre, l’État doit adresser une demande d’adhésion au Secrétaire général de l’ONU. Un examen est effectué par le Conseil de sécurité, puis il y a un vote à l’Assemblée générale (l’admission est validée si au moins 2/3 des États membres votent en faveur). L’Etat s’engage à respecter les obligations de la charte de l’ONU.

Malgré 193 membres, certains pays ne font pas partie de l’ONU, ou ont un statut spécial : 

  • Le Vatican : n’est pas un membre par choix. Il a un statut d’observateur permanent c’est-à-dire qu’il peut participer aux réunions de l’Assemblée générale, mais n’a pas le droit de vote et ne peut proposer de résolution.
  • La Palestine : n’est pas membre car elle n’est pas reconnue en tant qu’État par certains pays. Elle a le statut d’Etat observateur depuis 2012. Comme le Vatican, elle ne peut ni voter ni proposer de résolutions.
  • Taiwan : a été membre sous le nom de « République de Chine » jusqu’en 1971, avant que la Chine populaire (RPC) prenne sa place. Aujourd’hui, la Chine (membre permanent du Conseil de sécurité) bloque son retour dans les instances onusiennes.

Des missions aux multiples facettes

L’ONU agit dans des domaines variés et interconnectés. Ses missions principales sont :

  • Maintenir la paix et la sécurité internationales : notamment à travers les missions réaliser par les casques bleus et les résolutions du Conseil de sécurité
  • Protéger les droits humains : grâce à ses différentes agences comme l’UNICEF, ONU Femmes etc …)
  • Fournir de l’aide humanitaire : autour du financement de programmes d’urgence et de développement, d’agences comme le PAM (programme alimentaire mondial) … 
  • Promouvoir le développement durable : à travers les Objectifs de développements durables (ODD) adoptés en 2015, qui guident toutes les actions des Nations Unies 
  • Garantir le respect du droit international : grâces à ses organes judiciaires (Cour internationale de justice, Cour pénale internationale, tribunaux pénaux internationaux)

Les casques bleus : le bras armé de la paix

Les forces de maintien de la paix de l’ONU, plus connues sous le nom de Casques bleus, ont été créées en 1956, à la suite de la crise du canal de Suez. Leur mission : intervenir dans les zones de conflit pour protéger les civils, superviser les cessez-le-feu, désarmer les belligérants ou encore accompagner les processus de paix. Leur déploiement se fait uniquement sur décision du Conseil de sécurité.

Une mission emblématique : le Cambodge (1992-1993), la mission APRONUC

Après des années de guerre civile, l’ONU envoie plus de 20 000 casques bleus pour organiser des élections libres, désarmer les factions armées et reconstruire les institutions. C’est l’une des opérations de paix les plus complexes et complètes jamais réalisées. Sous le régime des Khmers rouges (1975-1979), le Cambodge a été plongé dans une instabilité profonde. Après leur chute en 1979, le pays a connu une période marquée par des conflits entre différentes factions, un gouvernement d’exil et une occupation vietnamienne.

Au début des années 1990, les tensions étaient toujours vives, et les différentes factions armées étaient responsables d’une grande partie des violences et des destructions. Le Cambodge avait besoin d’une réconciliation nationale, de stabilité politique et d’un processus de réforme institutionnelle pour sortir de la guerre et reconstruire le pays. C’est dans ce contexte que l’ONU a décidé d’intervenir.

Les résultats de la mission : 

  • Les élections, supervisées par l’ONU, se sont déroulées de manière relativement pacifique et ont permis l’établissement d’un gouvernement démocratiquement élu, avec un roi symbolique (Norodom Sihanouk) et un premier ministre élu.
  • Bien que le pays ait encore connu des tensions après les élections, la mission a été considérée comme un succès en termes de transition pacifique et de renforcement de la démocratie.

Les Objectifs de développement durable : une feuille de route pour l’avenir

Adoptés en 2015, les 17 Objectifs de développement durable (ODD) forment un plan d’action mondial pour éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous d’ici à 2030. Parmi eux : l’accès à l’eau, l’égalité des genres, la lutte contre le changement climatique ou encore l’éducation de qualité.

Les ODD ont été créés afin d’adopter un cadre universel. Ils s’appliquent à tous les pays, quels que soient leur niveau de développement, leur contexte économique et social. Cela a permis de mettre en place un cadre universel pour encourager des actions communes à l’échelle mondiale. Ils visent à équilibrer trois dimensions : le développement économique, l’inclusion sociale et la protection de l’environnement. L’objectif est d’assurer un développement durable sur le long terme sans compromettre les ressources pour les générations futures.

Utilisation et mise en œuvre : 

  • Suivi et mise en œuvre par les gouvernements : Chaque État membre est responsable de l’intégration des ODD dans sa politique nationale de développement. Cela se fait souvent via des plans de développement ou des stratégies nationales de développement durable.
  • Partenariats mondiaux et locaux : Les ODD encouragent des partenariats entre les gouvernements, les entreprises, les organisations de la société civile, et les citoyens. Ces partenariats sont essentiels pour atteindre les objectifs fixés, en partageant des ressources, des connaissances et des technologies.
  • Mesure des progrès : Chaque objectif a des indicateurs précis (plus de 230 indicateurs en tout) pour suivre les progrès. Ces indicateurs sont utilisés pour collecter des données au niveau mondial, national et local. Par exemple, l’Indice de développement humain (IDH) ou des rapports sur le climat mesurent l’avancement.

Une diversité d’agences et de programmes

L’ONU, c’est aussi tout un écosystème d’agences spécialisées, de fonds et de programmes. En voici quelques-uns :

  • UNICEF : Protection des droits des enfants. Exemple : L’UNICEF mène des campagnes mondiales pour l’éducation des filles dans les zones de conflit.
  • HCR : Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Exemple : En Afrique de l’Est, le HCR a fourni de l’eau potable, des abris d’urgence et une assistance alimentaire à des millions de réfugiés fuyant les conflits, notamment en Éthiopie et au Soudan du Sud.
  • OMS : Organisation mondiale de la santé. Exemple : L’OMS a coordonné la réponse mondiale contre la COVID-19, en soutenant les pays dans le développement de vaccins, en envoyant des médicaments et en organisant des campagnes de sensibilisation à la santé publique.
  • ONU Femmes : Protection des droits des femmes et des filles. Exemple : ONU Femmes a lancé des programmes de lutte contre les violences basées sur le genre en Afghanistan, en offrant des services de soutien psychologique, des abris sûrs et en sensibilisant la population locale à la prévention des violences.
  • UNESCO : Culture, patrimoine, éducation. Exemple : L’UNESCO a soutenu la restauration du patrimoine culturel en Irak, après les destructions massives causées par le conflit, en finançant des projets pour restaurer des sites comme Babylone et en formant des experts locaux en conservation du patrimoine.
  • PAM : Lutte contre la faim dans le monde. Exemple : Au Yémen, le PAM a fourni des rations alimentaires d’urgence à des millions de personnes touchées par la guerre et la famine. Le programme a aussi mis en place des initiatives pour améliorer la nutrition des enfants et des mères allaitantes.

L’ONU face aux défis du XXIe siècle

Crises humanitaires, pandémies, guerres, dérèglement climatique, intelligence artificielle… L’ONU est aujourd’hui confrontée à des défis complexes. Si elle est parfois critiquée pour son manque d’efficacité ou de réactivité, elle reste un cadre unique de dialogue, de coopération et d’action collective. Cependant, certains États, comme les États-Unis, se désengagent progressivement des Nations Unies, affaiblissant ainsi la coopération multilatérale. Par exemple, les États-Unis ont réduit leur implication dans plusieurs agences onusiennes clés ces dernières années.

En parallèle, des violations du droit international par certains pays exacerbent les tensions mondiales. L’actualité tragique du conflit entre Israël et Gaza illustre cette situation. Depuis l’attaque de grande ampleur du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 et la riposte militaire massive d’Israël sur Gaza, la région est plongée dans une crise humanitaire sans précédent. Les bombardements et le blocus imposé par Israël privent la population de besoins fondamentaux tels que l’eau, l’électricité et les soins médicaux.

Dans ce contexte de fragmentation mondiale et de non-respect des normes internationales, l’ONU reste essentielle. Elle incarne une tentative renouvelée de faire primer le droit sur la force et la solidarité sur les intérêts égoïstes. Pourtant, son rôle est fragilisé par ces dynamiques qui remettent en question sa capacité à agir efficacement face aux crises contemporaines

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