Le cycle paralympique s’est officiellement terminé lundi dernier. Les compétitions ont certes pris fin le 9 septembre mais l’exposition Histoires paralympiques s’est terminée, elle, lundi 30 septembre.
L’exposition, organisée dans le Panthéon, au cœur du cinquième arrondissement, traite de la naissance des Jeux Paralympiques et des premières délégations envoyées pour y participer. Il y a aussi tout un volet technique pour présenter les évolutions des équipements des athlètes ainsi qu’une partie plus médiatique pour montrer la façon dont les médias ont traité et traitent maintenant la question.
Prologue et naissance en Angleterre
Avant de commencer, il est important de préciser que des événements ont déjà été organisés avant les premiers Jeux mais ils tenaient plus du pittoresque, pour se moquer des personnes atteintes de handicap. En 1920, en revanche, une course est organisée à l’hippodrome Longchamp pour mettre à l’honneur un fauteuil conçu par la société Aumont, modèle qui reprenait le design des fauteuils de transports de blessés pendant la Première Guerre mondiale. Ce modèle s’activait à la force des bras.
En 1948, dans l’hôpital de Stoke Mandeville près de Londres, le médecin-chef Ludwig Guttman imagine une “Journée sportive” de compétition de tir à l’arc, le même jour que l’ouverture des JO de Londres, le 29 juillet. Cette compétition est ouverte aux pensionnaires de l’hôpital dans un but de rééducation par le sport. Cet événement rassemble alors 14 hommes et 2 femmes en fauteuil roulant. Assez largement médiatisée, cette idée dépasse les frontières anglaises pour arriver jusque dans l’Hexagone dans le milieu des années 50, moment où le sport est ici aussi intégré dans les traitements. C’est aussi à cette période que les mutilés de guerre font sortir la pratique sportive du contexte médical pour en faire un vrai loisir. Petit à petit, ils se rassemblent et finissent par fonder une association, l’ASMF ou l’Amicale sportive des mutilés de France, en 1954. Son président-fondateur Philippe Berthe, soldat de l’Armée de Libération ayant perdu sa jambe sur une mine, crée par la même occasion une revue (Revue des Mutilés de France) où il relate de la participation française aux Jeux de Stoke Mandeville.
Rome 1960, la première édition des Jeux Paralympiques
A peine 12 ans après les premiers Jeux de Stoke Mandeville, il est décidé que des “Jeux Para-olympiques”, réservés aux paralysés, seront organisés tous les 4 ans dans la foulée des JO et si possible dans la même ville. Rome est donc la première édition de ces Jeux en 1960, suivie de Tokyo en 1964. Après cela, il faudra attendre Séoul en 1988 pour que ces Jeux puissent se dérouler dans la même ville que les JO. Le président de l’ASMF saluera même les très bonnes performances des para-athlètes français qui feront mieux que leurs homologues olympiques. L’édition suivante, la délégation française comprend 20 sportifs, tous en fauteuil roulant. La période est marquée par une prise de distance par rapport à la visée rééducative du sport et par un rapprochement avec le sport de compétition. Une structure omnisport prend forme en France, elle est reconnue par le ministère dédié.
De nouvelles revendications font alors leur apparition. La demande est claire : intégrer les amputés, les aveugles et les malvoyants. Ces injonctions sont concrétisées à Toronto en 1976 puis à New York en 1984 pour les handicaps moteurs cérébraux. C’est finalement en 1989 que le Comité International Paralympique est créé pour marquer la fin du processus de regroupement des handicaps ainsi que le rapprochement avec le CIO.
Innovations technologiques et recherche de l’équité
Vers la fin du XXe siècle, les déficients auditifs rejoignent cette dynamique internationale du CIP. En parallèle, un nouvel imaginaire se développe autour des athlètes paralympiques en même temps que les technologies évoluent, c’est l’image du “paralympien hybride technologique”. C’est aussi une grande période de reconnaissance politique, les présidents de la République se montrent aux côtés des para-athlètes comme François Mitterrand ou Valéry Giscard d’Estaing tandis que le maire de Paris de 1993,Jacques Chirac inaugure le siège parisien de la Fédération française handisport. Côté technique, de nouveaux équipements apparaissent,comme les lames pour les coureurs amputés utilisées, par exemple, par le tristement célèbre Oscar Pistorius, longtemps porte-étendards des amputés dans le sport.
Malheureusement cette période n’est pas non plus toute rose. L’année 2000 en est le parfait exemple avec l’équipe handisport espagnol de basket. Les médaillés d’or du basket paralympique ont été accusés, par l’un des joueurs de l’équipe, de ne pas’être handicapés, physique ou mental. La fédération espagnole n’aurait, en effet, pas mené les tests requis pour catégoriser les athlètes, ce qui aurait permis à 15 personnes de passer entre les mailles du filet pour participer aux Jeux Paralympiques sans être touchés par un quelconque handicap. Cela a bien évidemment créé un énorme scandale médiatique, les médailles ont bien sûr été rendues et le président de la Fédération handisport espagnole a dû rembourser les 150 000 € de subventions perçues mais il a été épargné de sa peine de deux ans d’emprisonnement. Les déficiences mentales ont été retirées de l’édition 2004 à Athènes, il était trop compliqué à l’époque d’évaluer ce handicap. Cette catégorie est de retour depuis.
Le tournant de Londres 2012, les Jeux Paralympiques modernes
L’année 2012 est une année majeure pour le handisport. D’abord les sportifs déficients mentaux sont réintégrés dans trois disciplines, la natation, le tennis de table et l’athlétisme, mais surtout une nouvelle image vient s’attacher aux athlètes, celle du super héros. Le clip promotionnel de la compétition est intitulé Meet the superhuman et il reprend tous les codes des films Marvel avec des images chocs. De plus, de nouvelles figures apparaissent et sont mises en avant partout, dans les publicités, la mode et même le cinéma. De nouvelles disciplines font aussi leur apparition comme le para-badminton ou le para-taekwondo à Tokyo en 2021. Les mascottes évoluent aussi de sorte à apporter une touche esthétique aux équipements prothétiques comme on a pu le voir cet été avec les phryges équipées de lames.
Les Jeux Paralympiques c’est donc une longue histoire, entre combats et victoires, évolutions technologiques et institutionnelles, entre réussite et scandale. La présence médiatique du handisport n’a jamais cessé de grandir de sorte que pour les Jeux de Paris, les épreuves paralympiques ont été diffusées dans leur intégralité pour la première fois, au même titre que les JO. Il reste bien sûr quelques avancées à faire pour atteindre une situation idéales pour tout le monde mais Paris a su montrer qu’on était capable d’éprouver autant d’émotions que pour les olympiens.