En 2024, Naïlia Harzoune a marqué les esprits avec deux projets diamétralement opposés : un tournage international pour Sud-Est Babylon et une collaboration intime sur Bonjour Tristesse. De ces expériences, elle tire des leçons de liberté, d’humilité et de collectif. L’actrice affirme son envie de promouvoir un cinéma marginal, libéré des logiques de marché. Rencontre avec une actrice et productrice qui réinvente les codes.
Deux projets, deux univers
Pour Naïlia Harzoune, 2024 fut une année intense, rythmée par deux expériences artistiques contrastées. Sud-Est Babylon, une série tournée sur cinq mois, dont un mois en Thaïlande et à Singapour, représente une véritable aventure collective. « Ce que j’ai retenu de cette expérience, c’est l’importance du collectif. Du chef-opérateur aux régisseurs, tout le monde a travaillé ensemble sur ce projet. La série ne serait pas née sans cet esprit d’équipe », confie-t-elle.
À l’opposé, Bonjour Tristesse offrait une approche plus intime et horizontale. « C’était une collaboration fondée sur l’amour et le partage. C’est assez rare dans ce métier. Contrairement aux réalisateurs plus « control freak », ici, la hiérarchie était plus horizontale. Cela a été une vraie bouffée d’air frais », explique-t-elle. Ces expériences, bien que radicalement différentes, lui ont permis de réaffirmer ses valeurs dans son métier.
Un cinéma marginal, mais essentiel
Co-fondatrice de la société de production Vivement la Nuit avec Marguerite Thiam, Naïlia Harzoune nourrit des ambitions audacieuses : redonner une place au cinéma marginal. « On veut s’intéresser à des projets qui ne semblent pas populaires de prime abord, mais qui méritent d’être vus. C’est comme cet adage « on ne prête qu’aux riches », mais nous, on veut prêter attention à ceux qu’on ignore », affirme-t-elle avec conviction.
Elle évoque des inspirations comme Cassavetes ou les premiers films d’Almodóvar, marqués par une production indépendante et une approche artistique sans concession. « Ce qui rend ce travail fort, c’est que ces réalisateurs créaient ce qu’ils aimaient, sans se soucier des tendances. J’aimerais qu’on retrouve cette approche, partir d’une pure envie, même au risque d’échouer », déclare-t-elle.
Humilité et prise de risque
Pour Naïlia Harzoune, l’avenir du cinéma passe aussi par une éthique renouvelée. Les témoignages post-#MeToo révèlent des abus sur les plateaux de tournage et incitent à repenser les méthodes de travail. « En tant que spectatrice, je n’ai plus envie de voir des personnes condamnées au cinéma. Ce que j’aspire à voir, ce sont des prises de risques, des films portés par l’humilité, où le réalisateur se met en retrait derrière son sujet. C’est ce que j’ai aimé chez Cassavetes ou Justine Triet », confie-t-elle.
L’un des projets qui tient à cœur à Naïlia Harzoune est Chemcha, un film centré sur la relation d’un frère et d’une sœur confrontés à la perte de leur mère. « Ce film m’a attiré parce qu’il est marginal, difficile à produire, très écrit et centré sur le jeu des acteurs. J’aime que mon cerveau soit actif devant un film. C’est une histoire sur la résilience face au drame, un thème universel », explique-t-elle.
Regard vers 2025
Avec deux films prévus pour l’année 2025, dont un projet avec David Dufresne qui explore l’univers des influenceurs, Naïlia Harzoune reste fidèle à sa volonté de bousculer les codes. Si elle reste discrète sur ses projets à venir, elle laisse entrevoir un avenir riche en créativité et en engagement.
Naïlia Harzoune incarne une génération d’artistes qui rêvent d’un cinéma audacieux, libéré des pressions commerciales et tourné vers l’essentiel : l’humain.