En cent jours, Donald Trump a redéfini toutes les règles du jeu politique américain. Son second mandat s’impose comme un tournant autoritaire, marqué par des réformes brutales et des crises locales. En Floride, les lois sur le travail des mineurs et les tensions dans les universités illustrent une société en mutation.
Durant le début du mois d’avril 2025, la Floride a modifié ses lois sur le travail des mineurs, autorisant les adolescents, dès 14 ans, à travailler de nuit, même pendant les périodes scolaires. Cette réforme, soutenue par le gouverneur Ron DeSantis, vise à combler les pénuries de main-d’œuvre causées par les expulsions massives de sans-papiers. Les statistiques fédérales révèlent que les violations des lois sur le travail des enfants ont presque triplé ces dernières années dans l’État, tandis que le projet de loi SB 918 supprime les restrictions d’horaires pour les 14-15 ans scolarisés à domicile et les 16-17 ans, permettant de travailler sans pauses obligatoires. Les experts alertent sur les risques de décrochage scolaire, en particulier pour les jeunes issus de milieux défavorisés, dans un contexte où 27 % de la main-d’œuvre floridienne est née à l’étranger, et où les secteurs comme l’agriculture dépendent à 60 % de travailleurs sans papiers. « Pourquoi importer des étrangers illégalement alors que des adolescents peuvent faire ce travail ? », a justifié Ron DeSantis, selon des propos rapportés par le Tampa Bay Times.
Au seine des familles précaires, les jeunes sont contraints de choisir entre l’école et le travail, créant un cercle vicieux où l’éducation devient secondaire face à la survie économique. Cette dynamique fragilise non seulement les individus, mais aussi le système éducatif dans son ensemble, en réduisant le taux de scolarisation et en augmentant les inégalités. Les répercussions à long terme sont tout aussi préoccupantes : une génération privée d’accès à une éducation complète risque de voir ses perspectives d’avenir compromises, alimentant ainsi un cycle de pauvreté intergénérationnelle.
Universités en crise : entre violence et désengagement
Le 17 avril 2025, une fusillade à l’Université d’État de Floride a fait deux morts et six blessés, relançant le débat sur les armes à feu. Ce drame s’inscrit dans un contexte où les tensions sociales et économiques exacerbées par les politiques migratoires et éducatives de Trump affectent directement les campus universitaires. Les étudiants, souvent issus de familles touchées par les réformes sur le travail des mineurs, peinent à concilier études et responsabilités économiques.
Face à cette crise, les universités américaines voient leur rôle traditionnel remis en question. Les campus, autrefois perçus comme des lieux de sécurité et de réflexion, deviennent le théâtre de violences et de désengagement académique. En 2024, les États-Unis ont enregistré près de 16 000 morts par arme à feu (hors suicides), un chiffre qui reflète l’ampleur de la crise sécuritaire. Pourtant, les réponses politiques restent limitées : Trump se contente de déclarer que « ce ne sont pas les armes qui tuent, ce sont les gens », tandis que DeSantis se réfugie dans des prières publiques.
Une polarisation nationale accrue
La politique migratoire durement appliquée par l’administration Trump ne se limite pas à des expulsions de masse. Elle a également des répercussions directes sur le tissu économique de plusieurs États. La disparition progressive des travailleurs sans-papiers, notamment dans l’agriculture, a obligé des régions comme la Floride et l’Arizona à recourir à des solutions pour combler ce vide. En Arizona, par exemple, certaines exploitations agricoles recrutent désormais des enfants dès l’âge de 12 ans pour travailler dans les champs de coton. Ce recours à une main-d’œuvre juvénile, au mépris des normes internationales, soulève un véritable débat sur l’éthique et la réglementation du travail des mineurs dans un contexte de précarité économique.
Par ailleurs, sur le front culturel, Trump a officialisé l’anglais comme langue fédérale unique, un geste symbolique et polémique dans un pays historiquement façonné par son multiculturalisme. Dans une autre décision qui a marqué les esprits, le mont Denali a été rebaptisé « McKinley », effaçant ainsi un héritage indigène restauré sous l’administration Obama en 2015. Ces décisions témoignent d’un projet de refonte identitaire dans lequel l’effacement de certaines mémoires se substitue à une vision centralisée et uniformisante de l’Amérique.
Entre réformes autoritaires et crises sociales, le second mandat de Trump dessine une Amérique en mutation, où les droits des enfants et l’avenir des universités sont remis en question. Ce modèle pourrait inspirer d’autres dirigeants populistes, au risque d’éroder les fondements mêmes de la démocratie.